Juin taurin en Gascogne
(photos Matthieu Saubion Vuelta a Los Toros)
Exercice complexe mais très instructif que celui auquel j’ai
décidé de me livrer aujourd’hui. Sans me servir de mes notes, je me propose de
faire une synthèse des différents spectacles taurins qui se sont déroulés en
Gascogne durant ce mois de juin. Qu’est ce qui reste dans la mémoire d’un
aficionado d’une novillada, deux tentaderos, trois non piquées, une fiesta
campera et trois corridas ?
Tout a commencé en Gironde, à Captieux. Premier souvenir, il
y a dans cette partie du département un microclimat. Partout dans le département,
le ciel était noir, il a plu sauf au dessus de la placita. C’est tant mieux car
les organisateurs méritent de voir récompensés leur investissement et leur
effort pour maintenir la tradition taurine dans ce coin septentrional du
Sud-Ouest. De la novillada, et c’est à la foi paradoxal et inquiétant, on
retiendra qu’il ya eu deux mouchoirs bleus et aucun toro qui ressort d’un lot
noble « sans plus ».
D’ailleurs de tous les mouchoirs bleus qui vont fleurir cette temporada,
combien ne migreront pas de la mémoire immédiate de nos cerveaux vers au
minimum la zone de mémoire moyen terme ? Quasiment tous, le mouchoir bleu,
destiné à récompenser un grand toro, est devenu un instrument permettant de
créer de l’ambiance au même titre que les Pom Pom Girls sur un stade de Rugby. A
moins que les présidents ne s’en servent pour s’éventer quand il fait trop
chaud.
De cette première course de juin, on retiendra la grande prestation de
Dorian Canton qui a franchi un cap en intégrant à sa tauromachie de combat, des
passages plus artistiques qui manquaient jusqu’alors à son répertoire.
Le dimanche suivant, devoir de mémoire oblige, nous étions à
Aire sur Adour pour rendre hommage à Ivan Fandiño. Au-delà de l’émotion que créé naturellement
le fait de revenir dans l’arène où on a vu mourir un Homme, c’est le tentadero
du matin qui a retenu mon attention. Nous avons vécu un grand moment en
voyant Victor Mendès heureux de placer
et conseiller les élèves de Richard Milian
et pris une grande leçon de tauromachie avec Stéphane Fernandez Meca qui
a montré à ceux qui l’avaient oublié comment
toréer une vache d’encaste Guardiola.
L’après-midi, les toros de
Joselito faibles et décastés ont déçu. Juan del Alamo a tenu son rang par son
courage et son sens de la lidia. De
Thomas Dufau on retiendra quelques muletazos et des faenas non abouties, Escribano a confirmé qu’il était en
fin de carrière.
Une petite semaine de repos et nous revoici en Gironde pour
la journée taurine de La Brède. De la matinée on retiendra la qualité des
erales de La Espera confirmant les
précédentes sorties de cet élevage et le bon dernier bicho de la ganaderia Alma
Serena. La corrida de l’après-midi nous a apporté la démonstration qu’un cartel
doit comporter trois toreros si on veut une vraie compétition en piste. La mode
est aux mano à mano entre figuras qui permettent à celles-ci de toréer pépères
sans risque d’être remis en question par
un jeune torero aux dents longues. A La Brède, Colombo a mis le feu aux arènes
avec une faena de novillero à forte connotation pueblerina. Il a obligé Luque à
sortir de sa zone de confort. Le torero de Gerena a construit une grande faena
avec des séries de naturelles sublimes. Sans le coup d’aiguillon du torero
vénézuélien, il se serait contenté du triptyque traditionnel « je viens,
je promène la muleta et j’encaisse ».
Confirmation est donnée par la corrida du lendemain à Saint
Sever avec les deux premières faenas de Perrera. Le torero a fait du Perrera
adapté au contexte à savoir la tauromachie du torero de Badajoz avec une
distance entre lui et le toro proportionnelle à la catégorie de l’arène.
Heureusement
que Juan Bautista a toréé avec son métier et sa sincérité habituelle obligeant Perrera à
faire un petit effort au dernier. Mettez deux toreros comme Perrera et vous
avez une corrida triomphaliste avec des faenas en trompe-l’œil. Le paradoxe de
la course de Saint-Sever c’est qu’une grande partie des spectateurs, dont mes
voisins armoricains qui découvraient la corrida, sont sortis contents des
arènes alors pourquoi Perrera ferait-il plus d’effort. De cette course, je retiendrai la faena de Juan Bautista au
cinquième, toro manso, avec peu de passes dans le ventre, et qu’il a su obliger
et dominer.
Ce que l'on retiendra de cette journée au Cap de Gascogne, c'est la volonté des organisateurs de renouer avec la non piquée et la très grande qualité des erales de José Cruz
Le mois de Junon se termine à Castelnau Rivière Basse pour
la traditionnelle non piquée compétition entre les ganaderos du Sud-Ouest. De
cette journée, on retiendra un bon eral de Casanueva lors de la fiesta campera matinale,
un autre intéressant du Lartet l’après-midi et l’application et la
détermination de Solalito tout au long de la journée (ainsi que la dégustation
de Noir de Bigorre à midi) .Dommage qu’il n’y ait pas plus de monde à Castelnau
car la partie taurine est toujours intéressante, l’accueil agréable et l’investissement
des organisateurs normes. Mais il est vrai qu’il vaut mieux être vu aux mano à mano de Juillet.
Thierry Reboul
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