Retour sur une très intéressante édition de la Féria d'Hagetmau 2016
Photos de Matthieu Saubion,
Vuelta a los Toros
Les Fêtes de la Madeleine
finies, c’est Hagetmau qui prend le relais.
Féria, à taille humaine, et surtout Féria du novillo, les organisateurs chalossais avaient modifié pour l’édition 2016 leur programmation. Ils ont décalé la novillada du lundi au samedi et supprimé la non-piquée.
Féria, à taille humaine, et surtout Féria du novillo, les organisateurs chalossais avaient modifié pour l’édition 2016 leur programmation. Ils ont décalé la novillada du lundi au samedi et supprimé la non-piquée.
Il y avait un peu plus de
monde pour la première novillada cette année que pour celle du lundi en 2015.
Mais l’écart n’est pas forcément significatif.
La suppression de la non-piquée est pour moi dommageable. Ce type de
course permet l’initiation à notre tauromachie des plus jeunes tant acteurs que spectateurs. Peut-être
aurait-il fallu repositionner cette non-piquée le dimanche matin, comme dans d’autres
arènes. Pour compenser cette suppression, les Peñas taurines locales ont
organisé une tienta, le samedi matin avec un succès populaire trop limité. Il serait peut-être possible de copier ce qui
se fait à Tyrosse, avec une « mini non piquée » de deux erales, gratuit,
le dimanche matin juste avant la cavalcade. Les gradins sont remplis aux trois
quarts avec beaucoup d’enfants.
Mais je sais les conseilleurs
ne sont pas les payeurs, mais certaines grandes arènes seraient en mesure de
parrainer ce type d’opérations (on a aussi le droit de rêver).
Le bilan taurin de cette
édition 2016 est très positif. Il est surtout la preuve que l’on peut
construire une féria avec des courses de bon niveau et surtout très différentes
en s’appuyant sur des encastes dites « non majoritaires » et des
toreros de styles très différents. .
Et encore merci à la Peña A
las Cinco de la Tarde de m’avoir invité
à participer aux deux tertulias d’après novillada.
Arènes d’Hagetmau, Samedi 29 juillet,
Première novillada des Fêtes 2016
Cinq novillos de Raso de
Portillo et un de El Quiñon (4ème) pour
Manolo Vanegas : silence
après un avis, salut au tiers après un avis
Guillermo Valencia :
silence après un avis, vuelta
Juan de Castilla :
silence après trois avis, sifflets après trois avis
Vuelta du cinquième
contestable tout comme le salut du mayoral à l’issue de la course
Prix du meilleur piquero à
José Antonio Fernandez Lozano dit Valdeolivas (du nom de la ganaderia dont il
est le mayoral) pour sa prestation au cinquième novillo
15 piques pour une chute du
cavalier et une du groupe équestre
Cavalerie Bonijol
Ciel devenant orageux,
éclairage au cinquième
Président Romain Laffitte
(Mugron)
Petite demi-arène
Les Raso de Portillo ne sont
ni des premiers prix de beauté, ni monstres de bravoures, ni des monuments de bravoure. Ce
sont des mansos con casta qui donnent de
l’intérêt par leur présence et leur piquant aux combats qu’ils livrent en
piste. Face à eux, il faut des toreros expérimentés pour résoudre les problèmes
posés ou exploiter les opportunités offertes. Si Guillermo Valencia a su tirer
le maximum du cinquième, Juan de Castilla est passé complètement à côté du
sixième. Marqué par les trois avis à son
premier, il n’a pas su ou pu se reprendre et après une faena brouillonne, il a
entendu une seconde fois les trois avis.
C’est un évènement rare, la
dernière fois remonte à 1949 à Collioure, mais il est surtout symptomatique du
peu d’encadrement dont « bénéficient », certains jeunes toreros
espagnols ou sud américains de la part de leurs cuadrillas.
Manolo Vanegas est le plus
expérimenté de la terna. Son premier novillo fait illusion au premier tiers. Bien
mis en suerte, il pousse au cheval jusqu’à arriver à désarçonner le cavalier.
Il est en fait faible et charge avec noblesse mais sans grande énergie.
Il n’humilie
pas et quais gazapon ne se fixe pas
entre les passes. Le torero a du mal à se replacer et à trouver la bonne distance.
Il devra se contenter, et le public aussi, en première faena d’une seule bonne
série de derechazos. Le passage à la main gauche coïncide avec le fait que le
novillo se fixe enfin. Le bicho devient tardo, colle le torero. Il ne permet
plus que des moitiés de passes et la faena va à menos. Le public reste froid
après une bonne série de manoletinas et une estocade entière tombée.
Le quatrième est un novillo de
d’El Quiñon, l’autre fer de Raso de Portillo. Dixit l’éleveur, il n’y a pas de
différence entre les deux ganaderias. Mais l’utrero est très différent
morphologiquement des cinq autres (issus de trois segmentales différents) et
fera preuve de beaucoup plus de genio que de caste.
Il accroche le capote de
Vanegas dès les premières passes de cape, puis donne un peu de jeu en début de faena.
Jeu dont profite le torero vénézuélien, les premières séries sont techniquement
bonnes et laissent augurer d’une bonne faena. Rapidement le novillo s’éteint,
devient compliqué à droite, mais aussi à gauche. Vanegas conclue d’une bonne
entière. Il est invité à saluer au tiers en reconnaissance de son professionnalisme
et aussi de son implication en tant que chef de lidia.
Le second a plein de défauts. Il
est manso faisant sonner les étriers au premier tiers après avoir chargé avec
plus de violence que de bravoure.
Il ne baisse la tête ni dans la cape, ni dans
la muleta et envoie un gros coup de tête à chaque fin de passe. Bref ce n’est
pas un cadeau. Guillermo Valencia s’arrime
et corrige ce dernier défaut côté gauche. A droite, c’est mission impossible car le toro n’humilie pas
du tout.
Le torero, et le public, devront se contenter de deux bonnes séries de
naturelles avant que tout aille à menos avec en particulier une estocade très
basse.
Le cinquième est très bien présenté (armure et
trapio). Il rappelle les novillos qui ont fait les beaux jours des novilladas
de Parentis.
Il vient de loin et avec un joli galop. Guillermo Valencia en
profite pour scénariser le premier tiers. Il sait que cela porte sur le public
du Sud Ouest (cf. Rafaelillo à Mont de Marsan)
Il met loin le toro à la première pique car il a vu qu’il partait de
loin à la cape. Le toro pousse et prend une bonne rouste au cheval. Du coup, il
vient moins bien à la seconde et ne pousse quasiment plus Cela s’appelle lidier à l’envers. Du coup pas
de moyen de vérifier la bravoure C’est d’autant plus frustrant que ce toro est
probablement « un arnaqueur » .Il se donne des airs de brave, vient
de loin.
Mais il est distrait, y compris par la musique lancée trop tôt. Il se
tourne systématiquement vers les tablas, où par manque de fond ou parce qu’il a
perdu son moral au cheval, il a une très forte envie de se réfugier. Après une
bonne série à droite, avec un cite à la Rincon, il faudra attendre le passage à
gauche pour voir les meilleurs muletazos avec en particularité de belles
naturelles de face. . Valencia est sincère et appliqué et masque par son envie
de toréer les défauts du bicho. Il tue malheureusement mal. Chaque protagoniste
a droit à une vuelta, méritée pour le torero, hors de propos pour le toro.
Le Juan de Castilla de ce
jour sera très différent de celui que nous avons connu lors de ses précédentes
sorties Dans le Sud Ouest.
Son premier novillo, poids
plume de la course, parvient à renverser le cheval en poussant à la première rencontre.
Il sort seul de la seconde
et rechigne à la troisième. Le toro est noble à défaut d’être brave .Si on allonge
la charge, il suit bien .Le colombien
commet l’erreur de ne pas enchaîner les passes pour faire de vraies séries. Il
recule et petit à petit il accentue les défauts du novillo et inhibe ses qualités. La mise à mort sera un vrai calvaire pour le
jeune garçon. Le novillo tombe juste après le troisième avis.
Le sixième, lui aussi très bien
présenté, est brave et noble surtout à droite. Il sera trop et mal piqué
(protection du jeune torero oblige). Malgré cela, il a encore de la charge dont
ne sait pas profiter Juan de Castilla.
Dépassé muleta en main toréant de
face mais sur la mauvaise corne du toro, il est à nouveau à la dérive avec les aciers.
Le novillo, qui restera inédit, est puntillé depuis un burladero après la
troisième sonnerie. Espérons que le jeune garçon saura se reprendre avant d’affronter
les Los Maños de Parentis. Humain et aficionado, le public l’encouragera par
ses applaudissements à sa sortie des arènes.
En résumé, nous avons vécu
une novillada intéressante, compliquée qui s’adresse plus à un public d’initiés
et qui a manqué de toreros capables de la gérer, à l’exception d’un Vanegas mal
servi et moins « efficace » qu’à Aire.
Arènes d’Hagetmau, dimanche 30 juillet
Deuxième novillada de la Feria du
novillo 2016.
5 novillos d’Ana Romero, bien
présentés, souvent braves et toujours nobles et un sobrero de Raso de Portillo,
sorti en 6ème position pour remplacer le troisième titulaire qui
s’est cassé une corne.
Le premier Ana Romero, très
grand novillo est honoré d’une vuelta al ruedo amplement méritée
Pablo Aguado : salut,
une oreille
Leo Valadez : silence,
une oreille
Luis David Adame : une
oreille, silence
Salut de la cuadrilla de
Pablo Aguado après le tercio de banderilles du quatrième.
Le mayoral salue à l’issue de
la course
Douze piques avec une chute
du groupe équestre
Président : Nicolas
Pétriat assisté de Pascal Darquié et Fanny Ustarroz
Le soleil arrive juste après
le paseo.
Deux tiers d’arènes
Novillada pour initiés, hier,
novillada plus brillante, tout en restant sérieuse, aujourd’hui, les
organisateurs ont atteints les objectifs qu’ils s’étaient fixés.
Très typé Buendia, à l’exception
du second, les novillos d’Ana Romero ont combiné bravoure au cheval et noblesse à la muleta. Il leur a manqué
juste un peu de piquant pour le lot passe de la note bien à supérieur. On peut
juste regretter la fragilité des cornes, commodes comme souvent chez les Buendia,
qui se sont très vite détériorées pour certains exemplaires.
Supérieur, en tous cas, était
le premier novillo. Très brave à la cape, il a chargé de la première passe de
cape à la dernière de muleta, museau à ras du sol, répondant en humiliant au
maximum à toutes les sollicitations du torero. Pablo Aguado commettra l’erreur
d’interpréter un fléchissement du toro pour le signal qu’il fallait tuer. En
reprenant le toro, après l’avoir laissé récupéré un peu, pour deux ou trois séries,
il aurait pu y avoir une pétition d’indulto.
Et même, s’il a manqué de chispa, il n’y aurait pas eu matière à scandale si
elle avait été accordée. Et ce même du
point de quelqu’un à qui l’indultionite ambiante donne de l’urticaire.
Le premier Ana Romero est
superbement présenté. Dès les premières passes de cape, il met la tête en
humiliant.
Il prend avec bravoure et en poussant deux très belles piques.
Il
aurait pu en prendre une troisième légère. Tel un cocardier camarguais, il
vient aux planches, poursuivant systématiquement les peones. Offert au public
par Pablo Aguado, il gardera tête dans la muleta et la bouche fermée jusqu’au bout,
répondant au moindre cite. Le torero met en évidence les qualités de noblesse du
bicho en le toréant vers le bas et avec temple.
Comme d’habitude la main gauche
de l’andalou fait merveille, dommage qu’il reste marginal à droite. Le toro
fléchit un peu et Aguado commet l’erreur d’interrompre la faena alors que le
toro a probablement encore d’autres séries à offrir. En s’engageant pour tuer, le matador bute sur
une banderilles et l’épée résulte abominablement vilaine. Cela prive le torero
des deux oreilles qu’il pouvait espérer mais pas le novillo d’une vuelta amplement
méritée. Au moment des bilans de fin d’année, il est probable que cet Ana
Romero figure en tête des meilleurs utreros de la temporada.
Le quatrième a du trapio mais
peu d’armure. Manso à la pique, il est bien banderillé (salut de la cuadrilla).
Noble et un peu faible, et vient mieux à gauche.
Commencée à droite, la faena
tarde à démarrer. Ce n’est qu’en passant à gauche que torero et toro iront à mas.
Aguado profite alors du fait que le toro humilie bien pour donner de bonnes
naturelles.
Il coupera une oreille malgré une estocade, une nouvelle fois
approximative.
Hors type et le moins bien
présenté du lot, le second sera plus violent que brave lors des deux rencontres
avec la cavalerie.
Mal banderillé par Leo Valadez, l’utrero manque de force et a peu de charge. Comme les
latinistes débutants, le mexicain fait un contresens en ne croisant pas et n’en
n’allongeant pas la charge.
L’Ana Romero, déjà tardo, finit par s’arrêter à mi
passe. Pour ne rien arranger, l’épée est entière et très en avant quoiqu’efficace. Silence pour les deux
acteurs.
Le cinquième est bien présenté.
Leo Valadez, conscient de son échec à sn premier, veut forcer le succès. Il est
original et brillant avec le capote et les banderilles.
Le novillo sort seul de la seconde pique après
avoir poussé la première. Débutée par des derechazos à genoux, la faena du
mexicain va alterner des séries de bon niveau avec d’autres brouillonnes.
Le
garçon est motivé mais manque de métier
et est moins bien conseillé que quand il était en non piquée La faena est à la fois trop longue et incomplète.
Le novillo ; même tardo, permettait autre chose. Malgré une entière en
avant, le mexicain
Corne cassée après un choc
avec le peto, le troisième est renvoyé au toril. Sort à sa place, l’Ana Romero
prévu en sixième position. Ce novillo restera handicapé jusqu’à mi-faena par
les conséquences d’une impressionnante vuelta de campana.
Il est économisé au cheval.
Luis David Adame le toréé à
mi hauteur profitant de la noblesse du bicho.
Il déroule une faena standard qui aura le mérite de permettre au toro de
se reprendre et d’aller à mas mais ne transmet aucune émotion. Le mexicain
mettra beaucoup de temps à intégrer cette évolution du novillo dans sa manière
de le toréer.
Et c’est un peu tard, sur les
dernières séries, qu’Adame toréé au niveau du toro et au niveau attendu d’un
des leaders de l’escalafon. Il tue vite d’une épée en avant et coupe une
oreille.
Initialement venu pour toréer des toros d’encaste Buendia, Adame
doit affronter en sixième position, un réserve de Raso de Portillo. Pour l’observateur
la comparaison ente la troisième faena et la sixième est intéressante. Adame
aurait pu abréger, ne pas s’impliquer. Il aura le professionnalisme de tenter
une faena face à un toro complexe, qui ne se fixait jamais et répétait sans
attendre le toque du torero.
Comme il fallait s’y attendre,
le novillo est très sévèrement châtié au premiers tiers, châtiment qui ne l’affectera
pas outre mesure. Il a beaucoup d’énergie quand débute la faena. Même s’il est débordé,
Adame fait l’effort d’essayer de s’imposer et il y parviendra un instant en
tirant du Raso de Portillo, deux bonnes séries de derechazos avant de conclure
par une entière de côté.
Ainsi s’achève une très
intéressante Féria du Novillo à Hagetmau. Les organisateurs ne vont pas manquer
de l’analyser sur toutes les coutures, y compris sur l’aspect économique. Car
si artistiquement, elle a été une réussite, la fréquentation, en hausse par
rapport à 2015 n’est pas encore à la hauteur des espérances de ceux qui financent ces deux novilladas.
Thierry Reboul
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