Garlin: déception en pays béarnais

Photos Nicolas Couffignal  (matinale)et Romain Tastet (après-midi)
Arènes de Garlin, dimanche 9 avril
Fiesta Campera de l’Opportunité
Deux novillos, bien présentés de  Pedraza de Yeltès, meilleur le premier pour
Jorge Isiegas : salut au tiers
Carlos Ochoa salut au tiers
Quatre « vraies » piques
Cavalerie Bonijol
Trois quarts d’arènes
Depuis cinq ans, la Peña Taurine de  Garlin offre à deux novilleros, la possibilité d’intégrer le cartel de sa novillada annuelle en remportant les faveurs du public à l’issue d’une Fiesta Campera.
Cette année se sont Jorge Isiegas et Carlos Ochoa qui se sont affrontés. Le premier, mieux servi et plus efficace à l’épée, a remporté la compétition. On voit les limites et l’intérêt du système. Des deux Carlos Ochoa est celui qui a le plus d’officio et la tauromachie  la plus aboutie. Mais Isiegas s’est donné à fond face à un toro sérieux et exigeant.. La prime a été donnée par le public au courage par rapport à la technique. On peut en discuter et en particulier sur le risque de voir un torero dépassé par des utreros qui en principe demandent leurs papiers aux toreros. D’un autre côté, la tauromachie c’est aussi donner leur chance à des garçons courageux qui ont besoin de toréer pour progresser.


Le premier très typé Aldanueva est longuement applaudi à sa sortie en piste. Ben reçu à la cape par Isiegas, il accroche celui-ci sur une faute, le secouant durement. Le torero se venge par un très  bon quite par véroniques Le bicho est piqué par Nicolas Bertoli Il prend deux bonnes piques, poussant en mettant les reins. La compétition est lancée par un quite élégant d’Ochoa par faroles.   A la muleta, l’utrero vient avec noblesse en mettant la tête. Jorge le double bien avant de réaliser des séries à droite Les tentatives à gauche sont plus « courtes » car le toro vient moins bien de ce côté. L’animal qui a laissé de la force au cheval baisse un peu de ton et se réserve en fin de faena. Le torero est un vaillant, qui toréé  beaucoup à la voix. Il s’expose et sa tauromachie spectaculaire porte sur le public. Il s’engage pour une épée très en avant mais qui sera efficace avec une mort spectaculaire du Pedraza.

Le second plus bas et bizco est un peu juste de force. Il est piqué par Gabin Rehabi. Il prend deux piques poussant bien à la première, un peu moins à la seconde. Il à une corne gauche compliquée  Carlos Ochoa a du métier. Il toréé avec élégance en guidant bien la charge. Dommage que le toro, un peu fade, transmette moins d’émotion que le premier.  Peu de passes à gauche, mais de bonnes séries à droite qui semblent suffisantes pour qualifier le jeune madrilène. Hélas, celui-ci allonge trop la faena  et est obligé d’estoquer dans les barrières un toro quasi éteint. Malgré une bonne entière, qui succède à une demie en avant,  il faut deux descabellos pour conclure les débats.






Arènes de Garlin : dimanche 9 avril après-midi
Novillada de Printemps 2017
6 novillos de Pedrazas de Yeltès, très inégaux de présentation nobles mais manquant, sauf le quatrième,  de la caste habituelle, de cet élevage. La sortie en piste et l’arrastre du sixième sont sifflées 
Jorge Isiegas : silence, une oreille
Adrien Salenc : silence, un avis et une oreille avec division d’opinions
Marcos : une oreille discutable et contestée par la grande majorité du public, silence
Vuelta contestable au quatrième
Douze piques, une chute
Cavalerie Bonijol
Blessure du picador Nicolas Bertoli au quatrième
Salut des banderilleros El Santo et Miguelito au quatrième
Excellente brega de Marco Leal à ce même toro
Prix au meilleur novillo desertio
Prix à la meilleure pique Oscar Bernal (cuadrilla d’Adrien Salenc)
Température quasi estivale.
Quasi lleno

Après une matinée intéressante et un festival de garbure de haute tenue, c’est devant des gradins quasiment remplis qu’est sorti en piste le premier novillo. Il y avait beaucoup d’attente à ce moment de l’après-midi, il y avait beaucoup de déception à la sortie d’une novillada qui est à ranger dans la catégorie « à oublier ».
La faute en incombe en premier lieu au bétail. Martin Uranga et José Ignacio Sanchez sont en train de jouer au petit généticien (et à l’apprenti sorcier) avec leur élevage. Ils souhaitent diminuer le volume et adoucir le comportement et ont intégré des apports de Garcigrande et de Baltasar Iban.
Depuis deux ans, la ganaderia est en perte de vitesse et les quelques toros intéressants ne sont que des arbres qui cachent une forêt qui s’étiole.  C’est d’autant plus inquiétant que les seuls bons Pedrazas sont des bichos dans le type Aldanueva d’origine que veulent éliminer les éleveurs. Les autres manquent de fond à la pique et de piquant à la muleta. Et aujourd’hui  encore les deux meilleurs utreros (le premier de ce matin et le quatrième de l’après-midi) étaient des colorados, costauds, un peu biscornus, c'est-à-dire de vrais aldanuevas. Le cinquième, type Baltasar Iban mâtiné d’Aldanueva à laisser beaucoup trop de forces au cheval Les autres ont fait preuve de plus de noblesse que de bravoure et auraient du  perdre leurs oreilles si les novilleros avaient su les exploiter. (De vrais Garcigrande)
Il y a pourtant eu des trophées distribués. Mais à part celui accordé à Isiegas au quatrième, ils sont le fruit d’une présidence limite « duboutesque »  Le palco a touché le fond au troisième en accordant une oreille à Marcos après un hideux bajonazo et à la demande de trois amis du torero qui agitaient leurs mouchoirs et de trois autres personnes qui cherchaient à se rafraichir avec leur éventail. La vuelta accordé au quatrième est un de ses mouchoirs bleus modernes accordés à un animal qui a fait un peu plus que son devoir. Imaginez que l’on accorde une mention très bien à un bachelier avec 13 de moyenne. Au-delà de la dérive triomphaliste, le risque est une « mexicanisation » de la corrida avec des indultos accordés à des toros un peu plus au dessus de la moyenne.
Dans les couples, on dit que le cap difficile à passer est la septième année. Pour Garlin et Pedraza, ce sera la cinquième. Le souvenir des quatre premières novilladas devraient apaiser les tensions, à condition d’oublier le sixième novillo. Le ganadero est coutumier du fait. Il a toujours un bicho mal foutu qui a, parait-il, de bonnes notes et qu’il veut absolument vendre aux organisateurs. Cela avait fonctionné pour la première concours de Saint Perdon remporté par un toro gacho et brocho mais pétri de caste. Ce dimanche en Béarn, Uranga est allé trop loin. En sixième est sorti, un toro horriblement mal armé, qui aurait du sortir en festival ou lors de la Fiesta Campera matinale. En plus d’être laid, il est sorti faible et décasté. Pour la première fois, à Garlin, un Pedraza a été contesté a son entrée en piste et sifflé à l’arrastre.
J’ai trop d’amitié et de respect pour l’équipe de Garlin pour douter qu’ils sauront tirer la leçon de dimanche de déception. A nous de leur laisser une chance et de ne pas vouer aux gémonies ce que nous avons encensé depuis quatre ans.

Le premier toro manque de volume et est gacho. Il est noble à la capote. Il s’endort plus qu’il ne pousse lors de son unique rencontre avec le cheval. 

Il fait une vuelta de campana lors de la première série de Jorge Isiegas avec la muleta. Le toro est noble, limite soso. 

Il part plus au « vuelo » qu’à la toque et ne pose pas de difficultés particulières. Le novillero est vaillant mais il manque du sens artistique pour que ce type d’animal transmette de l’émotion. Le toro charge mais la faena est lassante d’autant que le torero finit par perdre du terrain à chaque série. Silence après un pinchazo, 2/3 de lame en avant et un descabello.



Le second est un peu mieux présenté. Il prend deux piques, sérieuse la première et plus légère la seconde mais avec une belle arrancada.

Adrien Salenc le double avec autorité Le toro se défend plus qu’il n’attaque dans la muleta. Comme à Samadet, l’arlésien commence bien la faena avec de bonnes séries. Puis il devient brouillon et ne pèse plus sur un toro qui se rapproche des planches. La fin est très décousue et mal finie avec l’épée.


Marcos Perez avait impressionné le public présent, en 2016, à Samadet par sa technique et la qualité de son toreo face à un très encasté novillo de Garcigrande (élevage appartenant à son grand père). Son premier adversaire est dès sa sortie en piste, tardo et faible. Il est très mal piqué à deux reprises et ne pousse qu’à la première. Le toro est soso  et manque de transmission. Le novillero construit une faena technique, imposant sa loi au toro. Mais il ne s’engage pas et reste très académique.

 Donc c’est propre, voire aseptisé et ne provoque ni émotion par le courage, ni émotion par l’élégance. La faena est conclue par un affreux julipié, efficace mais horriblement mal placé. Pour une fois, à cause de l’emplacement de l’épée, l’hémorragie est visible avant que le toro tombe. Tout aficionado ayant un minimum de culture taurine trouverait ridicule de récompenser par une oreille une faena sans âme ni contenu et une épée de gendarme. Le président lui en accorde une, ce qui déclenche, bien entendu et heureusement, une bronca. Heureusement que le ridicule ne tue pas.

Le quatrième est très applaudi à sa sortie en piste. C’est un vrai Aldanueva et il se comportera comme tel au cheval. Il pousse et renverse le groupe équestre après une longue pique très bien tenue par Nicolas Bertoli. Le cheval finit par céder, le piquero reste la jambe coincée et devra céder sa place à Gabin Rehabi 

L’arlésien pique à deux reprises avec le professionnalisme qui sied à la lidia d’un toro encasté. Les peones se mettent en évidence, Marco Leal par une brega efficace aux deux premiers tiers et El Santo et Miguelito aux palos (salut). On a en piste un vrai Pedraza.


 Le bicho est noble et encasté. Sans atteindre les sommets, il transmet beaucoup d’émotion et met en évidence le courage et l’envie de Jorge Isiegas. Malgré un bagage technique limité, le garçon enchaine de bonnes séries. Même s’il reste en dessous des possibilités du toro, il s’attire le respect du public et coupe une oreille, méritée, après une mise à mort en deux temps. La vuelta au novillo est discutable.

Le cinquième, comme le second de ce matin, est plus Baltasar Iban que Pedraza. Il est bien piqué par Oscar Bernal (qui obtiendra le prix du jour) mais laisse beaucoup de forces dans la première rencontre où il soulève à la verticale le cheval. 

A la muleta, il est noble mais ira à menos. La faena d’Adrien Salenc, pourtant bien commencée, ira elle aussi à menos comme sa première de cette après-midi.  Elle se finit dans les planches où le torero a du mal à fixer le toro.

Il tue de deux pinchazos et une entière à la rencontre et coupe une oreille contestée par une partie du public.

Rien à dire de Marcos et du sixième novillo.

C’est déçu et triste que le public quitte les arènes des Portes du Béarn, triste surtout que la réussite « taurine » n’est pas été à la hauteur de l’investissement et de la qualité de l’organisation. Mais en tauromachie, la meilleure corrida est toujours la prochaine, donc rendez vous l’an prochain à Garlin. Et puis n’oublions pas les quatre précédentes éditions de cette novillada de printemps garlinoise.

Rendez vous ce dimanche à Aignan et Mugron pour voir des erales, des novillos et des toros français avec face à eux des novilleros mais de matador français.


Thierry Reboul 

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