Novilleros attention danger !
photos Matthieu Saubion
Sans novillada, il n’y a pas d’avenir pour la corrida. Les coûts
d’organisation, la faible mobilisation des publics plus attirés par les
affiches bling-bling, et l’impossibilité de mettre les novilleros punteros face
aux novillos de respect y contribuent largement.
Un autre problème qui se pose est la pénurie de novilleros. Cela
peut paraitre paradoxal compte tenu du nombre de jeunes gens qui cherchent
désespérément un contrat. Le problème, au gré des échanges entre
empresas/apoderados est que nous voyons toujours les mêmes. Et plus grave,
blasés ou manipulés par leur entourage, ces novilleros manquent de chispa, d’envie
de toréer.
L’exemple le plus flagrant est la novillada de Bayonne. Sont
sortis en piste des Los Maños raisonnables de présentation. A la muleta, en
bons Buendias, ils étaient nobles, pastueños et même pour certains franchement
sosos. Ils devaient laisser entre les
mains des novilleros leurs oreilles d’autant qu’un des toreros Andy Younès
était sensé être prêt pour passer à l’échelon au dessus. Les deux novilleros, très peu motivés, ont
laissé passer les trophées qui s’offraient pourtant à eux.
Ils ont récité de façon mécanique des faenas standards sans originalité
et surtout sans prise de risques de peur de sortir du moule et de commettre des
erreurs. Et pourtant l’originalité, les erreurs de jeunesse font partie de la
novillada. Le quatrième novillo était un monstre de noblesse. Il suffisait de mettre
la
main très basse et de toréer de façon relâchée pour profiter des qualités du
bicho et faire une faena cumbre. On a vu un novillero appliqué certes mais appliquant surtout une faena modèle et des
attitudes standards qui l’ont fait rester en dessous des possibilités du
novillo.
Adrien Salenc, son compagnon de cartel, n’a jamais su trouver le
sitio face à des toros qui permettaient.
Les deux toreros ont failli à l’épée. A forcer de viser le rincon,
on finit par des bajonazos ou on pinche parce qu’on ne sait plus cadrer et
toréer un toro au moment de porter une
estocade.
On attend des novilleros, surtout en mano à mano, qu’ils se
tirent la bourre. Rien de tout cela, seul Salenc a fait un quite, timide, à un
novillo de son compagnon de cartel ;
Résultat, le public venu voir le cartel « qui allait tout
casser » s’est ennuyé sur les gradins.
A Dax, le schéma est quasi identique. Colombo et Carretero n’ont
pas de personnalité. Leur tauromachie est stéréotypée. Les oreilles coupées le
sont souvent après des bajonazos qui provoquent des morts rapides « fulminantes »
qui remplissent d’aise des publics qui confondent sincérité, et efficacité d’une
estocade avec chute rapide , souvent
aidée par les cuadrillas, du toro.
Seul Tibo Garcia, avec une personnalité « froide »
mais une vraie originalité, a essayé de sortir des sentiers battus mais il a
été mal servi au sorteo. Il a, en plus, un vrai problème avec les aciers qu’il va devoir résoudre rapidement.
Face à eux les José Cruz, faibles, nobles et fades, n’ont pas
transmis de l’émotion mais ne
demandaient qu’à être essorillés.
Résultat deux novilladas sensés être les « musts » de
la saison et qui laisseront autant de souvenirs qu’un sandwich acheté dans une
station service d’autoroute.
Et pourtant, l’entourage de la plupart des toreros n’a pas
arrêté de leur dire qu’ils ont été bien et même bons. Il n’est pas étonnant que
les novilleros ne se transcendent pas. Et pourquoi se fatiguer puisqu’un
bajonazo rapide d’effet et les cris (et je reste poli) des groupies des fans
clubs feront tomber les oreilles. Quand certaines peñas de toreros, je pense à
celle de Tibo, savent rester raisonnables, d’autres, faussent complètement les
courses. Elles sont à la limite de l’incorrection, insultant les présidences ou
quittant, y compris des responsables du fan club, les gradins quand leur protégé ne toréé pas.
Paradoxalement, si la France défend la novillada avec un vrai
investissement des clubs taurins organisateurs, le résultat n’est pas à la hauteur.
Que ce soit en courses toristes ou en courses toreristes, compétences et
motivation des novilleros ne sont pas au rendez vous.
Côté toros, il faut sortir du mono encaste et des élevages qui ont
fonctionné mais qui ne fonctionnent plus. Il y a des élevages, dans tous les encastes,
en France et en Espagne qui ne demandent qu’à faire leurs preuves.
La remise en question passe aussi par l’abandon du système des
échanges. De plus les cartels montés longtemps à l’avance barrent la route à
des novilleros qui se révèlent en cours de saison (exemple El Adoureño ou
Solera) ou sont simplement motivés (Cristobal Reyès ou d'autres..............).
Ils n’incitent pas les novilleros sûrs de leurs engagements à se battre et les
transforment vite en rentiers.
Un novillero doit gagner le contrat suivant à chaque passe qu’il
fait. Et s’il fonctionne ; il doit avoir sa chance de rentrer dans des
cartels aujourd’hui trop verrouillés.
Il doit, comme l’a fait Manolo Vanegas, affronter tous les encastes
et tous les types de public
La seule novillada intéressante que j’ai vue cette temporada, c’est
celle de Peralta.
Sur les gradins un public très jeune, enthousiaste mais
respectueux, au palco une présidence sérieuse, en piste les trois novilleros
sont « morts de faim ». Ils ont peu de contrats et se les gagnent à
la force de la muleta. Face à eux des
novillos d’El Pincha, sérieux de trapio
et de têtes, imparfaits (au sens toro moderne) de comportements mais qui se
bagarrent dans les trois tiers. Il y a eu de l’émotion (avec ces volteretas
caractéristiques des novilladas d’antan) et une course entretenue qui a ravi
aficionados et public occasionnel.
J’ai découvert un Fernando Florès très bon lidiador, un Aquilino
Giron volontaire et courageux et un Maxime Solera appliqué et respectueux de la
lidia dans les trois tiers ;
Comme quoi, avec des garçons motivés et un élevage en devenir et
bien géré, on peut retrouver l’esprit de la novillada.
Après tout n’est pas parfait dans ces pueblos espagnols. Il est
difficile d’admettre que certains novilleros payent pour toréer, ou bien
touchent quelques billets de vingt euros pour risquer leur vie. Heureusement
que chez nous quasiment toutes les empresas appliquent le convenio. Mais la France
ne doit pas devenir une vache à lait de toreros installés ou poulains de
grosses écuries qui se partagent le marché.
Le constat n’est pas très optimiste. Il y a du travail pour redresser la
situation. Même si on sait très bien que les figuras ont rarement été des
novilleros punteros. C’est surtout la novillada comme porte d’entrée en Aficion
pour les jeunes et moins jeunes qu’il
faut préserver.
Thierry Reboul
félicitation pour ce commentaire.il a danger si continu se genre de novillada
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