Dax 2017 : Déceptions et illusions

photos Philippe Latour et Nicolas Couffignal


Toujours aussi sympathique à vivre au travers des animations, de l’accueil des dacquois (la commission montoise devrait en prendre exemple), le Féria de Dax 2017 a été tauromachiquement décevante.
La plus grosse déception vient du bétail. Essentiellement d’origine Domecq, les toros ont failli par leur présentation indigne d’une arène de première catégorie et leur comportement de bédigues idiotes qui suivent bêtement la muleta ou s’éteignent à la troisième passe. La palme revient aux Domingo Hernandez livrés avec les bagages du Juli. Minuscules, ils ont totalement manqué de caste et de race.
Les toros de Montalvo et d’El Ventorillo distillent un profond ennui. Sosos, faiblards, ils n’existent que portés à bout de bras par le torero, à condition que celui-ci soit capable de créer l’illusion de la présence d’un toro en piste.
La plus grande déception est venue du lot d’Adolfo Martin. Bien présentés, ils avaient autant de race qu’un lot de moruchos. Contrastant avec leurs congénères montois, ils n’avaient au plus deux séries dans les pattes et n’étaient même pas dangereux. Cette année, Adolfo Martin a vendu des corridas dans la plupart des grandes férias. Il n’est pas étonnant qu’il y ait dans la camada de mauvais toros. Le problème, c’est que le hasard, les a tous regroupés dans le lot dacquois.  


Heureusement, il y a quelques satisfactions. Tout d’abord, les deux lots d’erales des non piquées, globalement bien présentés, ont donné du jeu et permis aux novilleros de montrer ce dont ils étaient capables (ou pas). On mettra de côté, l’insolation dont a été victime Didier Touya, le président de la finale, qui a sorti trois mouchoirs bleus. La vuelta est déjà discutable en non piquée. Les deux premiers erales de Guadaira étaient très nobles mais aussi extrêmement naïfs et sans vraie caste. Le plus intéressant et le plus sérieux a été le troisième qui a poussé Adame à sortir de sa tauromachie superficielle et bling-bling, l’obligeant à se croiser et à toréer avec sincérité. Les deux meilleurs erales de la compétition resteront les second et quatrième du Lartet sortis pour la novillada qualificative. Très bien présentés, issus d’une lignée qui a très bien fonctionné cette temporada, ils sont sortis avec beaucoup de caste et une noblesse piquante qui transmet beaucoup d’émotion pour peu que le novillero ait quelques capacités.

Reste la corrida de Pedraza de Yeltès. Pour moi, c’est une très bonne corrida de troisième tiers.  Il y a aujourd’hui en France une mode « Pedraza » malgré des sorties très moyennes de l’élevage. Il est clair que les ganaderos ont cherché à réduire le volume de leurs toros et surtout adoucir leur comportement. La conséquence est que la majorité des Pedrazas qui sortent aujourd’hui sont ordinaires à la pique.  Ils poussent à la première rencontre puis ne poussent pas aux suivantes, les palos étant souvent immédiatement levés. Ils viennent de loin, mais ce n’est pas que cela la bravoure.. L’application porté aux premiers tiers à Vic montre que si on place bien les toros et qu’en insistant, nombreux sont ceux qui partent du centre de la piste. On a été très loin du tercio de Tito Sandoval, avec Miralto où le toro partait du toril et, pique à la base du morillo, baladait à la poussée un cheval qui résistait de toute ses forces. Ce qu’on a vu à Dax, ce lundi, ce sont des toros, palo levé, collés à un cheval qui ne résiste pas. Le seul vrai tercio de piques à la Pedraza, c’est celui du sixième, avec le bémol de la présence d’un cheval léger face à un toro très lourd et puissant. La première pique est magistralement donnée par le piquero, le second contact est trop court pour juger le toro, et la troisième avec la pique de tienta est parodique.

Si on fait le bilan de cette corrida, après trois toros très ordinaires, on a vu un quatrième inexistant au cheval, sublime à la muleta et un sixième brillant au cheval mais mal toréé et vite éteint au troisième tiers. Quand on entend, José Ignacio Sanchez parler du quatrième comme étant d’indulto, on comprend le type de toros qu’il veut produire. Il est clair qu’il cherche à attirer les figuras et sortir du circuit des corridas pour toreros « valientes ».
Cela me fait mal au cœur de voir les Pedrazas découverts par Garlin ressembler à des Fuente Ymbro chers aux montois.
Au-delà de l’évolution de cet élevage, je crains la création d’une corrida « couleur torista », comme à Malaga, on a vu une corrida « couleur toreriste » et qui seraient à la corrida toriste ou toreriste ce qu’est le mousseux au champagne.
La corrida dacquoise de lundi, reste dans mon souvenir, comme une corrida intéressante et  entretenue, agréable à suivre, surtout après les purges infligées par les toros sortis samedi, dimanche et mardi. C’est une bonne corrida, mais pas une grande corrida et surtout pas une grande corrida torista.  Ce n’est que mon modeste avis, mais j’invite les aficionados à revoir, sur Corrida TV, les images de 2014 et 2015 et de les comparer à celle de 2017 ;

Côté toreros, on va vite éliminer le Juli, scandaleusement démotivé face au bétail qu’il a imposé aux organisateurs. Il s’est fait sifflé, fort justement à sa sortie des arènes. Hélas je pense qu’il s’en moque autant qu’il s’est moqué de nous.
Talavante est un torero artiste, atypique et à la tauromachie originale. Il a été intéressant à Dax mais face à un bétail de peu de valeur.

Curro Diaz est mal remis de sa blessure, et a quand donné quelques bons muletazos à son second Montalvo.




Lorenzo, Galdos ont encore des choses à apprendre. Galvan et Roman ont été très faibles. Le dernier est passé à côté du sixième Pedraza, heureusement que Rafaelillo a assuré la lidia au premier tiers. Malgré son succès à Madrid, le valenciano-breton me semble loin d’avoir les qualités pour devenir une figura.
Respect pour Escribano, Ureña et Martin Escudero qui se sont coltinés six Adolfo totalement dénués de caste et de race.
Je suis content pour Rafaelillo qui a touché un monstre de noblesse qu’il a su mettre en évidence avec ses moyens.  Contrairement, à quelques années en arrière, face à un Escolar Gil, il a très bien tué et a coupé deux oreilles méritées.
J’ai beaucoup aimé Daniel Luque qui, bien que mal servi au sorteo, a construit, avec finesse, deux faenas intéressantes face aux Pedrazas. Dommage qu’il n’ait pas touché le quatrième.
Ginès Marin est un bon torero, il a su donner un peu de relief à des Ventorillos sosos, à voir par la suite, même si j’ai un doute.
Juan Bautista surfe sur son début de saison et sur la vague de son triomphe montois. Il a le public dans sa poche dès le paseo. Il a été intéressant à Dax mais en dessous de ses sorties vicoise  et montoises. Il est vrai que les Montalvo ne transmettaient pas grand-chose.

Quel intérêt a-t-il à estoquer à recibir des toros sosos et tardos ? L’estocade comme la lidia, doit être adaptée au comportement de l’animal.
Son duel avec Castella, les deux toreros ne s’aiment pas beaucoup, à donner du piquant à cette corrida dominicale malgré un bétail bien terne. Il a conduit Castella à réaliser la meilleure faena de la Féria à son premier toro. Bautista venait de faire une faena, qui avait porté sur le public, mais sans jamais se croiser. Toréant à contre style, le biterrois a mis la jambe à chacun de ses muletazos, toréant en donnant de la distance et laissant respirer le bicho. Le message de  Castella à Jean Baptiste était clair.  « Moi, aujourd’hui ; je charge la suerte et torée avec classe et sincérité ». Dommage que le toro, et la mise à mort n’aient pas été à la hauteur de ce qui restera la meilleure faena de la Féria.


Pour ce qui est des juniors, ils ont failli à l’épée  avec cette manie de viser le rincon qui se termine souvent par un quasi bajonazo dont l’efficacité trompe le public peu expert des non piquées matinales de Dax.  La finale a été logiquement remportée par Alejandro Adame. Le mexicain s’est racheté face au très exigeant troisième Guadaira de trois faenas brillantes mais superficielles avec une utilisation systématique du pico et des estocades très basses.

Dorian Canton a alterné de très bons passages avec d’autres plus brouillons. Laissons le mûrir sans trop brusquer les choses.
J’aurais aimé voir El Rafi et Manuel Diosleguarde face aux deux premiers Guadaira.
Villita a vu son eral esquinté par un recorte maladroit d’un peon, il mérite une seconde chance, d’autant qu’il a coupé deux oreilles le lendemain à Béziers.


Ainsi se termine une Féria dacquoise globalement décevante, rendez vous est pris à TOROS Y SALSA pour le desquite.

Thierry Reboul

Commentaires

  1. Vous ne parlez pas de la corrida renon du 15 au matin, pourquoi???
    Bonne fin de journée

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. claude, j'avoue avoir trop peu de connaissances sur le rejon pour en faire une analyse pertinente. Avec ma vision "lidia du toro",j'ai apprécié le sérieux et la toreria de Hernandez et l'application de Lea Vicens. J'ai peu apprécié la prestation plus "spectacle" de Cathagena

      Supprimer
  2. Je suis globalement d'accord avec toi. On espère mieux pour septembre

    RépondreSupprimer
  3. claude, j'avoue avoir trop peu de connaissances sur le rejon pour en faire une analyse pertinente. Avec ma vision "lidia du toro",j'ai apprécié le sérieux et la toreria de Hernandez et l'application de Lea Vicens. J'ai peu apprécié la prestation plus "spectacle" de Cathagena

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

LES VISITEURS - LA RÉVOLUTION

SALAMANCA 23

YHANN KOSSY & LUCAS VERAN